« J’entends battre le cœur de la Chine »: autour du livre de Serge Koenig… Philippe Rochot
- Philippe Rochot
- 23 avr. 2013
- 3 min de lecture
« Un diplomate qui est entré en Chine il y a trente ans en passant par l’Everest et qui continue de grimper les falaises ou de voler en parapente intrigue… » Serge Koenig résume en cette phrase un autoportrait qui me parait fidèle.

Serge Koenig à Lhassa (Tibet) octobre 2000. Photo Ph Rochot.
A 55 ans ce guide chamoniard a pénétré en Chine par la voie royale : celle du Tibet, au début des années 80. On le rencontre ainsi sur les flancs de l’Everest durant la première expédition française de l’après-guerre sur le versant chinois. Depuis sa passion pour les montagnes de l’Himalaya ne l’a pas lâché. En 1988, avec l’opération Sagarmatha, il réussissait à filmer en direct l’ascension de la plus haute montagne de notre terre. Même si l’expédition a été endeuillée, l’exploit marquait un pas important dans la couverture télévisée de la conquête des géants de l’Himalaya. On en retrouvera un nouvel aspect en juin 2008 avec l’itinéraire de la flamme olympique au sommet de l’Everest, filmé en direct pour des milliards de téléspectateurs.

Lhassa (Tibet) Serge Koenig en escalade (oct 2000) (Ph Rochot).
C’est le récit de son parcours d’obstacles que Serge Koenig raconte dans son livre « j’entends battre le cœur de la chine ». Car l’homme vit à présent depuis cinq ans au beau milieu de l’empire, dans la province du Sichuan, sur les « marches du Tibet » où il développe un projet de coopération pour le développement des sports de montagne avec les Chinois. L’intérêt du programme « Alpes Sichuan » est aujourd’hui totalement reconnu, mais ça ne fut pas toujours le cas. Côté Chine d’abord : « traiter dans ce pays c’est commencer par accepter que le Chinois soit maître du jeu et toujours gagnant » écrit Serge Koenig. Mais côté français il faut surmonter la méfiance du lobby tibétain qui estime que toute coopération avec la Chine surtout dans un domaine qui touche le Tibet est suspecte.

Ecole des guides de Lhassa (Tibet) 2005 (Philippe Rochot)
L’alpiniste chamoniard en a fait l’expérience en montant en 2000 l’école des guides de Lhassa, destinée à former des Tibétains pour conduire vers les sommets les montagnards chinois et étrangers. Les associations de défense du Tibet ont mené campagne contre cette institution cherchant à la discréditer, attaquant même les journalistes comme votre serviteur pour avoir fait des reportages sur cette école qui n’allait pas tarder disaient elles à en « chasser les élèves tibétains pour mettre des Chinois à la place… » Il n’en a rien été. Je suis retourné dans cette école des guides de Lhassa quatre ans après. Elle était financée par Airbus qui soutient ce projet aujourd’hui encore.

Ecole des guides de Lhassa (2005) Photo Ph Rochot.
Des Tibétaines y ont même fait leur entrée et le plus grand mur d’escalade au monde que j’aie jamais vu a été construit là. Plus de dix ans après ce projet est reconnu et accepté par tous : une petite victoire pour Serge Koenig qui a bien failli perdre sa place à l’Ecole nationale de ski et d’alpinisme..

Aujourd’hui le guide chamoniard est devenu vice-consul de France à Chengdu, la capitale de la province du Sichuan ou il réside d’où il gère le programme de “développement montagne” Chine : des « via ferrata », des stations de ski pour lesquelles il faut souvent aller chercher la neige en altitude.
Serge Koenig a dû affronter le grand tremblement de terre de 2008 qui a fait près de 90.000 morts, puis le dernier séisme d’avril 2013 mais ces catastrophes ne changent rien à ses projets, ni à ceux des Chinois. C’est peut-être aussi cela entendre battre le cœur de la Chine.
Philippe Rochot
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