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John Cantlie et le jeu diabolique de Daech… Philippe Rochot.

  • Photo du rédacteur: Philippe Rochot
    Philippe Rochot
  • 16 juil. 2016
  • 3 min de lecture

L’attentat de Nice nous a fait tourner un peu vite la page de la tragedie vécue par John Cantlie, otage britannique entre les mains de Daech depuis plus de trois ans. Le journaliste qui continue de jouer son rôle “d’envoyé spécial” de l’Etat islamique apparait très diminué dans une vidéo enregistrée devant les dégâts provoqués par les bombardements de la coalition à l’université de Mossoul.

Cantlie juillet 2016 Mossoul

John Cantlie a du mal à marcher alors qu’il réalise un “plateau” en mouvement devant l’université de Mossoul.(image Daech)

Les Britanniques n’aiment pas traiter avec les preneurs d’otages. C’est là leur moindre défaut. Un otage capturé perturbe le jeu international et la politique du pays, diffuse des vidéos dérangeantes sous la pression des ravisseurs, entraîne la création de comités de soutien, provoque des manifestations ou des campagnes de pétitions nuisibles à l’intérêt supérieur de la nation. L’otage britannique John Cantlie en fait sans doute l’amère expérience. Voilà plus de trois ans qu’il est entre les mains de Daech. Il a partagé la détention d’otages français comme celle des journalistes Nicolas Hénin et Didier François. Il les a vus partir après huit mois de captivité mais il est resté détenu par des ravisseurs au comportement imprévisible et pervers. Les hommes de Daech ont utilisé dès le début les qualités professionnelles de Cantlie pour le présenter comme l’envoyé spécial de l’Etat islamique sur le front du Jihad. Déjà huit vidéos de propagande à son actif où il dénonce les résultats des bombardements de la coalition, souligne la joie de vivre des habitants de Mossoul sous l’autorité de Daech ou s’affiche en reporter de guerre sur le front de Kobané.

Apparition Cantlie

Les métamorphoses de John Cantlie à l’épreuve du temps et de ses trois ans et demi de détention.

Fini le temps où les otages ânonnaient devant une caméra un communiqué rédigé par les terroristes. Il fallait inventer autre chose. A présent les ravisseurs confient un rôle à l’otage et nous renvoient en plein visage les gesticulations de ce pseudo envoyé spécial modèle BBC ou CNN. John Cantlie est-il libre de ses propos ? A-t-il choisi librement de devenir le porte-parole de Daech pour sauver sa peau ? S’est-il volontairement converti à l’islam ou a-t-il pensé qu’il était de bon ton de prononcer la Chahada pour être mieux traité ? Lui seul pourrait répondre, mais quand on sait que Cantlie a été enlevé en compagnie du journaliste américain James Folley qui sera exécuté en août 2014, on peut penser que sa marge de manœuvre est des plus limitée. Il sait que Londres ne paiera pas pour lui, qu’il ne sera pas l’enjeu d’une quelconque négociation et que son destin est uniquement entre ses mains. L’opinion britannique n’est guère mobilisée sur son cas. La seule pétition qui circule sur les réseaux sociaux en faveur de sa libération concerne uniquement les « résidents hors du royaume uni ».

CANTLIE-facebook

Les habits neufs de John Cantlie, en tenue d’Envoyé spécial. (Photo Daech)

Didier François, journaliste d’Europe1 qui a partagé sa cellule le décrit comme quelqu’un de pragmatique: « Il avait la certitude que son gouvernement ne négocierait pas sa libération. Il a donc rapidement adopté une stratégie de survie ». Ses fonctions de porte-parole de Daech ne lui valent pourtant guère un traitement de faveur. La vidéo du 12 juillet dernier a quelque chose d’inquiétant. On y voit un homme amaigri, pale, les traits creusés, qui a du mal à marcher. Cela prouve que le comportement de John Cantlie est bien le résultat d’une pression physique et morale inacceptable sur un otage désemparé.

Les esprits forts y voient déjà une forme du syndrome de Stockholm où l’otage s’attache à la cause de ses ravisseurs. C’est oublier que Cantlie aux dires de ses proches est un homme solide. Penser de même qu’il s’est converti aux « valeurs » défendues par Daech laisserait supposer qu’il est dépourvu de tout sens moral, ce qui est loin d’être le cas. Comme l’écrit l’ancien otage Nicolas Hénin sur les réseaux sociaux : « Sa captivité n’a pas de raison d’être et enfreint toutes les règles de l’islam. John est un grand homme, pieux et généreux. Il connaît les valeurs de justice et de vérité. Il faut le libérer ».

Philippe Rochot

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