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JR et sa « mécanique de l’épreuve » (expo MEP)… Philippe Rochot.

  • Photo du rédacteur: Philippe Rochot
    Philippe Rochot
  • 6 nov. 2018
  • 3 min de lecture

Le terrain de jeu de JR, c’est d’abord la rue, les bâtiments abandonnés, les murs lépreux des banlieues parisiennes ou des favelas, les ponts d’Afrique ou les barrages aux frontières du Mexique, le mur de la honte entre les Territoires palestiniens et Israël, ou encore les grands espaces et les zones industrielles. Alors quand on annonce une expo JR à la Maison Européenne de la Photo on est plutôt sceptique. JR peut-il tenir dans un espace aussi exigu que la MEP, même après rénovation ?


L’intérêt de l’exposition qui s’ouvre et qui occupe tous les espaces de cette noble institution est d’abord de retrouver JR à ses débuts, avec ses timides photos de murs des banlieues où apparaissent quelques graffitis. On peut même admirer l’appareil photo avec lequel il fit ses premières armes : un Sony trouvé dans le métro en l’an 2000 et qui jouera un rôle déterminant dans la suite de sa carrière fulgurante.


Extrait de “Visages villages” lors du tournage du film avec Agnès Varda…

L’expo porte le titre ronflant de « Momentum ou la mécanique de l’épreuve. » Momentum est un terme issu de la physique mécanique et désigne « une impulsion qui déclenche une accélération du mouvement comme celui du processus créatif de JR, depuis les graffitis de ses débuts jusqu’à ses œuvres monumentales. » Et de fait, de drôles de machines apparaissent dans l’exposition : mini trains électriques en mouvement, engins étranges qui doivent nous aider à pénétrer dans son univers.


Miniature de trois mètres de long du cargo géant où fut lancée l’opération “Women are heroes”. Il y manque la dimension JR.

On retrouve la marque de toutes ses grandes opérations qui lui ont apporté le succès et la gloire. Mais il faut y apporter des nuances. On peut toujours reproduire dans une salle de la MEP le cargo géant qui transporta l’opération « Women are heroes » avec ses graffitis en XL sur les containers, mais le côté grandiose n’y est pas. Or l’œuvre de JR ne se conçoit que dans ses grandes dimensions. Ce cargo réduit à trois mètres est juste un élément d’information pour le visiteur, surtout pas une œuvre.


JR inaugure de même un nouveau mode de création : « la fresque vidéo », composition fantastique géante qui s’étale sur les murs avec des dizaines de personnages en léger mouvement, donnant à l’œuvre une étrange dimension. Le thème choisi est par exemple le contrôle des armes à feu aux Etats-Unis, thème récurrent que JR étale devant nous, mais sans porter de jugement.


Mur de séparation entre Israël et les Territoires palestiniens: 2012. (PR)

Car JR se veut simplement un artiste « engageant » et non pas « engagé ». Il se défend d’être un activiste : «Quand j’ai mis un portrait géant d’un enfant mexicain, Kikito, sur la barrière qui sépare le Mexique des États-Unis, c’était un geste très politique, mais je ne suis pas un activiste. Je soulève les questions et c’est aux gens d’apporter leurs réponses.”


Frontière Mexique-Etats-Unis.

Dix huit ans après ses débuts, JR se définit comme un « photograffeur », un néologisme qui englobe à la fois la photographie et le graffiti mais l’homme reste difficile à classer : «Les institutions ont dû s’adapter à mon parcours. Je n’ai pas pris le chemin imposé par les galeristes… Un gamin de 17 ans connaît mieux mon travail qu’un conservateur de musée. C’est aux gens d’apporter leurs réponses et leurs perspectives. »


Faire entrer les anonymes au Panthéon: l’un des nombreux défis de JR. et une géniale provocation. Paris: 2014. (Ph. Rochot)


Paris, quais de Seine: portait de la série, Women are heroes”. (c) Ph Rochot.

JR n’est pas avare de ses œuvres. Il finance son art éphémère avec seulement 2% de sa production artistique.  Son travail photographique en tirage limité se vend en moyenne 40 000 euros ce qui lui permet de réaliser ces collages immenses que l’on retrouve par exemple dans cinq stations du métro parisien.


La RATP est associée à l’opération et au lancement de l’exposition « Momentum ». JR l’a voulu ainsi et il explique pourquoi : « C’est un retour aux sources. J’ai commencé à prendre des photos avec un appareil photo trouvé dans le métro, puis j’ai suivi des artistes qui travaillaient dans ce monde souterrain. Revenir dans le métro, exposer sur les quais, c’est l’occasion de présenter mon travail à des gens qui n’ont rien demandé, qui ne se sont pas déplacés dans une galerie ou un musée, mais qui se rendent simplement au travail ou vont voir des amis. C’est conforme à ma vision de l’art qui doit aller à la rencontre des gens. »

Philippe Rochot


Photo monumentale de JR aux rencontres d’Arles: 2007. (PR)

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