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Visa pour l’image : Lu Guang et ses photos choc de Chine. Philippe Rochot

  • Photo du rédacteur: Philippe Rochot
    Philippe Rochot
  • 3 sept. 2017
  • 2 min de lecture

Avec son visage rond et son sourire en coin, l’homme affiche en permanence un air malicieux. Lu Guang fait partie de ces photographes qui ne se laissent pas impressionner par la censure, les menaces ou les tentatives du pouvoir chinois pour le décourager. Lu Guang est un photographe de choc.

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Les villages du cancer. Li Xu, trois ans, a du plomb dans le sang à cause des déchets toxiques qui empoisonnent la région où vit sa famille. (c) Lu Guang.

Je le rencontre en 2003 à ses débuts lors du festival de Pingyao en Chine, une manifestation culturelle à 500 km de Pékin, étroitement encadrée par le Parti communiste. Lu Guang expose une série d’images sur le Sida en Chine, un sujet tabou où les autorités de la province du Henan sont compromises. Il craint de me parler. Il ne veut pas faire trop de publicité à son expo car il redoute des représailles. Je le revois quinze ans après, hier soir à Perpignan pour l’ouverture du 29ème festival Visa pour l’image et c’est un homme sûr de lui, déterminé, toujours motivé, volontaire que j’ai devant moi. Il pèse aujourd’hui deux World Press et son témoignage est reconnu partout.


Son thème favori : les conséquences du développement de la Chine. Lu Guang arpente les endroits les plus pollués du pays, comme la Mongolie intérieure qui suffoque sous les fumées d’usine, les vapeurs toxiques, les rejets chimiques qui empoisonnent la vie et la santé des paysans.

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Lu Guang montre par exemple cette usine de Mongolie qui rejette des vapeurs toxiques empêchant toute forme d’élevage. Ironiquement les paysans du coin ont placé là des moutons en plâtre pour donner l’illusion que des bêtes peuvent encore trouver leur place ici.


Pollution dans la région centrale de Chine. (c) Lu Guang.

On peut en rire mais le constat de Lu Guang est sans appel : « Les sept fleuves majeurs de Chine sont devenus des caniveaux pour des centaines de milliers d’industries et les villages du cancer continuent de se multiplier à travers les provinces de Chine ». Pour dénoncer cela, Lu Guang séjourne des mois entiers dans ces villages, surveillant l’évolution de la santé des malades, veillant parfois les victimes.

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Souvent les parents meurent en premier et les enfants orphelins n’ont pas d’établissement où aller. Alors le gouvernement verse des subventions (200 yuans, soit 20 euros par mois) pour que des paysans les prennent en charge. Une femme d’un village du Henan a pu recueillir ainsi près d’une centaine d’enfants et sa maison elle-même s’est transformée en orphelinat.


Lu Guang dénonce ici le trafic de bois précieux de l’Afrique vers la Chine. Son expo “bois de sang” a quand-même pu se dérouler à Shanghai.

(c) Lu Guang

Lu Guang se sait menacé. Parfois des paysans l’appellent pour lui demander de renoncer à faire ses images mais ces coups de fil étranges sont faits sous la pression de la police. Lu Guang le sait et continue malgré tout son travail. Il affirme que grâce à ses photos le gouvernement a fait des efforts pour lutter contre la pollution, créant de nouveaux canaux pour éviter les déversements des produits chimiques dans les rivières, obligeant des usines à fermer, d’autres à installer des filtres spéciaux sur les cheminées qui crachent leurs fumées toxiques.


Lu Guang se plaît à dire qu’un riche industriel américain qui vend précisément des filtres et des capteurs pour les usines polluantes lui a acheté des photos : pour l’exemple.

Philippe Rochot


Expo Couvent des Minimes: Perpignan: 2017. Photo de Jean Loh avec remerciements.

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